Au cours de mon enfance, il m’a été inculqué une très haute idée de l’amitié. Une très haute idée de l’amour, aussi – vous savez, cette amitié particulière entre partenaires sexuels. Et puis également une très haute idée de l’Amour universel. Tellement hautes, ces idées, qu’elles étaient en fait assez nébuleuses.
Il en ressortait, pour moi, que j’étais forcément indigne de tout cela, parfaitement inapte à l’amitié et à l’amour.
Ces hautes idées m’ont tellement imprégné qu’elles sont restées en moi. Il y a quelques années, j’ai dit à un type que j’avais rencontré quatre ou cinq fois et avec qui j’avais discuté à une ou deux reprises en compagnie d’autres personnes, "si cela continu, on va devenir copain !" Il m’a répondu, étonné, " Je pensais qu’on l’était déjà !" Et je fus, à mon tour, étonné de sa réponse : nous ne parlions sans doute pas de la même chose !
Plus tard dans la vie, un autre mot m’a effrayé de la même façon, le mot "orgasme?". Qu’est-ce qu’on a pu dire à propos de cet instant au cours du XXe siècle !